LAKCHMIE
Aujourd’hui j’avais décidé de me rendre sur les tombeaux de Mère et Sri Aurobindo situés Marine Street, dans la ville blanche. Quelques lectures m’avaient permis une approche succincte de la vie de ces personnages, illustres s’il en est, ici, à Pondicherry.
. . . Déjà du 40° à l’ombre ! . .
Mais il est reconnu qu’en cet endroit précis du globe, circulent des énergies aussi énigmatiques que spectaculaires. BB et moi nous en sommes convaincus au cours de nos séjours.
Nous couchant tard, nous levant tôt, " arpantant " toute la journée malgré la chaleur qui devrait être accablante, nous n’avons jamais ressenti la moindre fatigue, la moindre lassitude, le moindre découragement.
A noter que le tsunami à balayé tous les alentours mais n’à pas touché cette ville. Présents à cette triste époque, nous pouvons en témoigner. . . Le matrimundi également n’a pas été construit spécialement ici par hasard.
Je me trouvais donc au niveau de la poste et allais remonter par une rue perpendiculaire. Celle-ci était interdite à la circulation par des barrières amovibles que la police installe régulièrement un peu n’importe où semble-t-il mais . . je ne suis ni fin stratège ni dans le secret du maintient de l’ordre et cela m’ est d’ailleurs complètement égal !
Passée la chicane, des mendiants jonchent le sol sur une trentaine de mètres.
Serais-je blasé ? ? .
A la suite de notre première virée en Inde ( de Delhi à Bombay ), BB avait promis sinon juré, qu’elle ne remettrait plus jamais ses petits pieds ( 36 ) dans ce pays.
Si l’on n’assimile pas tout de suite le système des castes, il ne faut pas faire ici d’expérience en routard ! !
Comme ailleurs, ça grouille de monde. . . Fidèles, pèlerins , quidams, touristes . .
Mais mon regard est déjà porté sur le Manakula Vinayakar temple ou Ganesh temple dont la façade ne se découvre que d’assez près.
En face, quelques boutiques proposent des bibelots, de l’artisanat, bananes, bottes d’ « herbe magique « , corbeilles d’offrandes . . .
Mais . . .
C’est LA que je vous quitte,
que je décroche de . . . ce monde ! !
La sensation . . Le sentiment qui m’envahit sont indescriptibles !
IL est là, superbe ! magnifique !
Le gardien, le Dieu vivant, à l’entrée de
SA maison !
Je n’ai plus aucune autre sensation que la perception des images qui s’offrent à mes yeux .
C’est je l’avoue la première fois que j’assiste à un tel rituel.
Imposant bien sur autant que peut l’être un pachyderme, mais, dans le cas présent, ses ornements et décorations lui attribuent une certaine majesté.
Je suis planté là, au milieu de la foule dont je n’entends plus le brouhaha, ne sens même plus ceux qui me bousculent. J’assiste à ce balai dont l’animal est la vedette . . .
Ce rituel ou cérémonial, n’aurait dû être que curieux, voir intéressant . .
Mais ces hommes, ces femmes qui s’approchent respectueusement de la bête, mains tendues présentant de modestes offrandes . .
Entre les grandes oreilles qui battent, ces petits yeux qui scrutent . .
Cette trompe qui se soulève lentement, se déploie . .
Ce " museau " qui se saisit, s’approprie délicatement de la roupie, de la touffe d’herbe ou de la banane qui lui est présentée . .
Cet homme, cette femme qui joint alors les mains devant son visage et incline la tête . .
L’appendice à nouveau qui se soulève et vient effleurer le crâne du bienfaiteur . .
« SA bénédiction » ! .
Celle-ci étant donnée en retour ou remerciement du don, la trompe retourne alors :
soit à la bouche de l’animal s’il s’agit de comestible,
soit vers la main du cornac s’il s’agit de roupie (s).
Les « fidèles » attendent sagement leur tour . . Défilent . . .
Certains présentent même leur bébé que l’animal bénit aussi avec une infinie délicatesse.
IL bénit . . .
IL bénit à tour de trompe . .
Pathétique !
L’émotion me submerge . .
Je n’y résiste pas !
Complètement inconscient du sacrilège que je vais accomplir, j’écarte ces braves gens qui me séparent de LUI et me mets à lui parler . . .
« Qu’IL est grand . . qu’IL est fort . . qu’IL est beau . . qu’IL est gentil . . »
Je ne sais plus . .
Le miracle se produit ! !
« Dieu » m’entend tout d’abord . . . Semble ne rien comprendre . . .
J’arrive au premier rang . . passe devant . . son petit œil me voit . .
que
IL arrête tout ! ! !
Je n’ai rien dans les mains . . Aucune humilité dans ma démarche . .
Le brouhaha que je n’entendais pas se transforme en silence que je n’entends pas plus . .
Peut-être quelques murmures d’indignation ? ? .
Sa tête énorme est maintenant toute entière tournée vers moi . .
Ses deux petits yeux me scrutent . .
La trompe se soulève . .
Se déploie . .
Le cornac n’a pas le temps de dire OUF ! ( je le marque comme ça parce que je ne sais pas traduire le tamoul )
Je l’embrasse de mes deux bras . . l’étreins . . la serre . . fort . . très fort . .
Là ! . .
je sens . . oui ! je sens l’hostilité qui m’entoure et
j’entends . . oui ! j’entends les ordres hurlés par le cornac ! . .
Mais rien n’ y fait ! ! !
Le fluide est passé dans les deux sens .
Le coup de foudre nous a frappé l’un et l’autre . .
autant l’un que l’autre, avec la même violence, la même intensité.
Je reste accroché à cette trompe que je considère plutôt sur le coup comme une "main tendue", qui lentement me ramène jusqu’à cette masse à laquelle je parle . .
Le cornac qui redoute le pire fait tout ce qui aurait dû interrompre immédiatement ce manège. .
Tout contre l’animal, mon étreinte se relâche et se transforme en caresses. .
La trompe s’enroule alors autour de mes épaules . .
Le « petit museau » passe autour de mon cou . .
Se saisit de ma barbe qu’il se met à aspirer . . sucer . . téter . .
Bien plus que les quidams, le cornac en personne reste maintenant sans voix , incrédule.
SA bête lui échappe ! !
Un signe ? . . un vrai , de Ganesh ? .
De la crainte ? du respect , soudain pour ma personne ? ? .
Dans les poils de ma barbe, des larmes s’infiltrent . . glissent jusqu’au « petit museau » . .
Sur mes mains qui caressent cette énorme tête, des larmes ruissellent . . .
De par le monde une multitude de photos doivent circuler qui ont immortalisé cette scène . . .
ce ne sont que du papier ! . . . . .
J’aurais d’autres émotions, plus tard, sur les tombeaux de Mère et Sri Aurobindo . .
Pour l’heure, je ne peux faire moins que
d’aller acheter quelques bananes ! .
Que je peux déjà lui offrir sans cérémonial ni intermédiaire !
Quel bonheur ! !
Jusqu’à la fin de mon séjour à Pondy, il ne s’est évidemment pas passé une journée sans que j’aille faire un câlin à . . .
MON PHAN !
Ma barbe y a laissé des plumes ! ! !
De nombreux touristes ont encore dû augmenter le contenu de leurs albums souvenirs grâce à des clichés comme ceux-ci .
Paradoxalement je suis peut-être un de ceux qui en a le moins.
Ehh . . . on ne peut pas être partout !
Après qu’il ait fini par admettre que je n’étais pas vraiment le fils de Ganesh, j’ai sympathisé avec son maître.
Une fois néanmoins , le brave homme m’à fendu le cœur.
C’était ce soir ou une grande procession était organisée, qui devait parcourir une bonne partie de la ville y compris remonter la fameuse "rue de Nehru".
L’organisation, comme dans toutes manifestation impliquant des divinités ici, était assez spectaculaire.
Tous les prêtres du temple y participaient qui devaient bénir chaque fidèle se présentant à eux, porteur d’offrande ou non.
Un sacré boulot en perspective au vu de la foule conséquente déjà massée devant le temple et appelée à grossir tout au long du parcours.
Ils étaient juchés sur un énorme char tout de lumières.
A celui-ci était accroché un non moins énorme groupe électrogène pour alimenter toutes ces ampoules.
Le tout étant mû par une poignée d’hommes de bonne volonté.
Le « phan » lui,
en étant la vedette
ouvrirait la marche.
Le maître m’a littéralement supplié ce soir là, de rester HORS DE VUE de
SON éléphant ! ! ! !
J’ai certes souvent frôlé l’inconscience dans cette histoire tant les sentiments l’ont emporté, mais n’aurais jamais commis telle folie ! ! !
qu’il était beau
Mon PHAN ! ! !
Et quel régal à le voir, lui, le Dieu de la fête, abuser outrageusement de tous les pouvoirs qui lui étaient conférés ce soir là !
Piochant allègrement dans tous les étalages . .
Se servant copieusement de tout comestible étant à sa portée . . .
Se goinfrant sans scrupule de ce qui normalement lui est interdit . .
Je resterai discret jusqu’à la fin de la cérémonie.
Mais j’ai grandement apprécié son délire .
Franchement partagé son bonheur ! ! .
De plus, après le 25ième kilo de bananes et la ½ tonne d’herbe que je lui ai acheté . . . le marchand d’en face ne jurait plus que par notre amitié ! !
Les tombeaux de Mère et Sri Aurobindo se trouvent à deux pas dans Marine street .
Du coup je me rendais régulièrement aussi en ce lieu particulier leur rendre une petite visite.
L’endroit est resté très sobre.
Nul aménagement particulier n’a été réalisé pour recevoir le flot journalier de personnes venant ici se recueillir ou en simples curieux.
Le « mur d’enceinte » comme en possède pratiquement tout ce qu’il y a de bâti dans la ville blanche.
La bâtisse dans laquelle a vécu Sri Aurobindo désormais bibliothèque / librairie / petit musée.
La cour intérieure / jardin, relativement modeste en rapport à la plus part de celles qui sont « dissimulées » dans la dite ville blanche.
A l’abri d’une simple tonnelle, les deux tombeaux sont là, côte à côte, toujours ornés de compositions florales,
toute plus magnifiques les unes que les autres.
Celle-ci n’est qu’un modeste exemple qui n’a rien à voir avec les véritables « tableaux » recouvrant les tombes.
Mais les prises de vue étant strictement interdites, je n’en dispose malheureusement d’aucun témoignage visuel.
. . . Bon, quelques minutes de film tout au plus, mais chutttt ! !
Tout ici est empreint de sérénité et amène, dans le sens de la visite . .
Au silence . . au respect . . . à la méditation ou prière . . . en tout cas à la déférence !
C’est chaque fois très humble que j’ai quitté ce lieu.
Après celui de la spiritualité, le retour en ce bas monde est assez cruel car, pour l’anecdote :
Il faut bien sur se déchausser avant de pénétrer chez son hôte et peut être ici plus qu’ailleurs.
Généralement à l’entrée de chaque temple ou « lieu saint » il faut, avant d’en franchir la porte, escalader une montagne de gaudasses déposées « en vrac » par les visiteurs. .
Ici non !
Pas question d’un tel déballage sur le trottoir attenant !
C’est donc de l’autre côté de la rue qu’a été (installé) organisé le dépôt.
Il va de soi que suivant l’heure de la journée, tout le monde n’a pas l’âme d’un fakir pouvant marcher sur des braises ! ! ! …………….
Et puis le jour fatidique ,
celui là même que l’on souhaite le plus tard possible . .
qu’on espère même qu’il n’arrive jamais . .
NOUS est tombé dessus ! ! !
Non, plutôt un ADIEU ! . .
C’est sûrement pour ça que ce jour là, à la veille de mon départ . .
IL a chialé plus que moi . .
J’ai fait de mon mieux pour
abréger ce moment
douloureux où j’étais
SON ..
( je ne saurai jamais …)
qu’IL ne voulait plus lâcher !…………..
Il y aura bien sur LA retrouvaille ! ! que je conterai plus tard . . . .
De ma barbe hirsute, j’ai gardé ce toupet au menton . .
C’est en quelque sorte NOTRE alliance.
IL a pu encore en jouer à sa guise et . . .
Que DIEU NOUS prête vie encore quelques mois pour d’énièmes retrouvailles ! ! !
. . . Qu' est - ce que c' est BON ! ! !